Añañuca

par Sebastián Ibarra-Gutiérrez

 

[Note de l’auteur]

L’añañuca est une plante endémique de l’Amérique du sud, célèbre par la joliesse de ses fleurs à six pétales roses, blancs ou jaunes, mais typiquement rouges, qui pousse librement aux deux côtés de la cordillère des Andes, en Argentine et au Chili, notamment dans les régions de Copiapó et de Coquimbo dans ce dernier pays. Selon la légende, Añañuca fut une jeune fille indigène, éclatante de beauté, habitant dans la vallée du Limarí (Coquimbo), qui tomba amoureuse d’un mineur à la recherche d’un riche gisement. Celui-ci ne revenant plus de la cordillère, ayant péri sans trouver son trésor, Añañuca perdit toute envie de vivre et mourut de chagrin. Au lendemain de son enterrement dans la montagne, toute la vallée apparut couverte par des ravissantes fleurs rouges — les añañucas —, qui porteront à jamais le prénom de la jeune demoiselle qui ne sut oublier son bien-aimé.

 

viens

ténuité d’encre

ta poitrine de cinabre

à m’attendre

je découds six pétales en sang

ensevelissement     déchirure     nous

tourmaline

descends

ta cordillère éclôt

ci-gît ta corolle

ton prénom-punition

à s’imbiber de temps

jaillit

jusqu’à la vallée de ton ventre

jusqu’à la

couleur fragile

reviens

pistil     souffrance

à terre

la mort déshabillée

ma faute

sacrifice

je m’attache au tremblement qu’est ta fleur

veinule     éparpillée     tellurique     intraduisible

ailleurs     châtiment

déhiscence endémique d’étoile

retourne

pollen au nom dévoré

il est d’amours qui ne commenceront jamais

frémissement     minéral     ventre

à trembler

comme une nuit sans douleur comme

une añañuca qui s’effondre

 adieu

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