Le temps comme un album d’Éric Lapointe


par Britany Gome

 

             entre tuer le temps
Pris
             et mourir d’ennui

le temps ne meurt pas
au bout de lui-même
le temps

change de face
fait trois petits tours
et pis s’en revient

tout faire
pour ne rien faire

dans les bars
laisse-moi
parler

sinon
mesurer en verges
ton vide intérieur

laisser le temps
tomber
à nos pieds

comme le fait la pluie
comme le font nos vêtements

comme toutes choses
sans gravité

ou avec

le temps ne nous arrive plus
à la cheville

sans doute passer à côté de
                quelque chose comme soi-même

laçant

ne trouver d’attaches
que les velcros de ses souliers.

compter
sans jamais toucher l’infinité
(si mal)

toujours compter
compter toujours

jusqu’à prêt-pas-prêt-j’arrive

une tempête
bourrasque

les branches du temps
lourdes
plient
sous le verglas

tiens tiens
il est et demie

tu sauras jamais
faire
ma sauce à spag

y’a pas de recette pour être bon

grandir
c’est se sentir de plus en plus petit
dans les bras de sa mère

pis p’tit
tu r’tires tu d’l’impôt toi c’t’année?

les heures sont une histoire
qu’on se compte pour se faire peur

à quelles angoisses tu échappes
quand tu gosses sur ton cell en métro
à quelles peurs tu te mesures
quand tu scrolles facebook

sans cesse hors soi-même
gamin pris dans une quotidienne
pour ne pas rentrer
encore une couple de minutes
please

se jouer prisonnier d’une série télé
ou même
de la poule aux œufs d’or
ou bien
juste de ses poches

on se conjugue
en retard
partout
tout le temps

arriver
ici

ou à côté

quelque part

toucher quelque chose

se faire demander
de se retirer avant

le temps
se replie
sur lui-même
comme un album d’Éric Lapointe

le temps
se replie
sur moi
comme une obsession

                                       pause
impossible d’en sortir
                                       stop
impossible d’en sortir
                                       cri

on ne se conjugue plus
quand

« t’es mort ou j’joue pu »

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